Leutnant
Démocratie Participative
25 octobre 2018
Le progrès.
Ce serait une première en France. Alors que la filiation est au cœur des débats qui entourent la Procréation médicalement assistée (PMA), la cour d’appel de Montpellier devait rendre hier un arrêt de principe sur un cas bien particulier, rapporte Midi Libre. Saisie par un couple d’Héraultaises, Marie et Claire, elle doit statuer sur la possibilité pour un enfant d’avoir deux mères biologiques. Tout commence en 2011 lorsque Bernard, époux de Marie et père de ses deux enfants, décide de devenir femme, sans pour autant subir d’opération chirurgicale. Une transition acceptée aussi bien sur le plan familial que juridique. Quand Bernard devient Claire, le tribunal de Montpellier reconnaît « de façon irréversible son appartenance au sexe féminin, sans qu’aucune opération de réassignation sexuelle n’ait été ni exigée ni pratiquée. »
Les choses se compliquent trois ans plus tard, lorsque Marie donne naissance à leur troisième enfant, conçu biologiquement avec Bernard devenu donc entre-temps Claire. Les deux femmes veulent alors toutes deux être reconnues comme mères de l’enfant. Refusant d’adopter son propre enfant, et ne pouvant pas être qualifiée de père puisqu’elle est femme, Claire décide donc de saisir le tribunal de grande instance de Montpellier. Mais, le 22 juillet 2016, celui-ci refuse cette solution jugeant que « par l’acte de procréation masculine qu’elle revendique », Claire « a fait le choix de revenir de façon unilatérale sur le fait qu’elle est désormais reconnue comme une personne de sexe féminin, et doit en assumer les conséquences ».
Peu satisfaites de cette issue, Claire et Marie ont donc fait appel. Car dans le droit français, la filiation paternelle et maternelle ne s’établit pas de la même manière. En ce qui concerne la maternité, le lien est établi biologiquement : la mère est la femme qui porte l’enfant et qui le met au monde. La maternité se prouve donc « par la gestation et par l’accouchement ». Quant à la paternité, le lien est avant tout social : le mari de la mère qui accouche est présumé être le père de l’enfant. En cas d’union libre ou de Pacs, le lien paternel est établi par la reconnaissance de paternité, une démarche effectuée par le père. Ce n’est qu’en cas de contestation de paternité que l’on va s’attacher à la dimension biologique, via des tests ADN, par exemple.
Pierre Paliès, l’avocat de l’enfant, saisi par l’UDAF, l’Union Départementale des Associations Familiales, défend une autre position : celle selon laquelle Claire doit être reconnue comme le père de l’enfant. « Cette paternité n’est pas contestable biologiquement. Ce qui est original, c’est que ce soit juridiquement une femme qui soit l’origine masculine de l’enfant » a-t-il expliqué. « Ce troisième enfant aura lui aussi une mère, et une filiation paternelle. Même si elle est assurée par une femme. Cela donne à cet enfant une égalité de droit par rapport à ses frères. Et cela stabilise sa filiation. » Le délibéré de la cour d’appel qui devait être rendu ce mercredi a été prorogé au 14 novembre.
Sinon, nous vivons dans un état parfaitement normal.