Leutnant
Démocratie Participative
27 septembre 2019
Selon la loi islamique, Driss est innocent.
Meurtre ou suicide ? Les deux convictions se sont opposées frontalement hier matin devant la justice, à Poitiers, deux ans après la mort de Stéphanie Devred retrouvée brûlée à 90 % dans son appartement de Saint-Eloi. La mère de deux enfants a-t-elle succombé après une semaine de souffrances à un suicide par immolation ou bien est-elle morte des suites du crime incendiaire de son compagnon ?
Driss Tarzi conteste depuis le début avoir attenté aux jours de Stéphanie cette nuit d’octobre 2017. Il l’a redit encore, hier matin, répétant avoir voulu la sauver du feu.
« J’ai fait ce que j’ai pu pour éteindre le feu. Elle était arrivée dans le salon avec une bouteille de white-spirit et un briquet, je lui avais enlevé la bouteille des mains, je lui avais dit d’aller se doucher, je suis revenu dans le salon, j’ai vu une lueur… », a raconté le quadragénaire devant la chambre de l’instruction. Il réclamait sa mise en liberté, un an après sa mise en examen suivie de son placement en détention provisoire pour meurtre sur conjoint.
Cette liberté, les proches de la jeune femme, les deux avocates des parties civiles et l’avocat général la jugent inconcevable. Les débats se sont étirés beaucoup plus longuement que de coutume devant la chambre de l’instruction transformée en mini cour d’assises. Tout le monde plonge à corps perdu dans le dossier, décortiquant le moindre détail : conclusion de l’expert incendie, bouteille de white-spirit scrutée sous toutes les coutures, comme les variations de discours du compagnon.
Mes Julie Méry et Ludivine Schauss, rejointes par l’avocat général Thierry Phelippeau, demandent le maintien en détention du quadragénaire. Ils dressent le portrait d’un homme violent, alcoolique, que Stéphanie venait de mettre à la porte, d’un suspect qui adapte ses déclarations à mesure que les investigations le mettent en cause, relèvent le caractère hautement improbable d’une immolation avec du white-spirit selon l’expert.
« Ah oui, il a toujours été constant dans ses déclarations pour nier, c’est vrai, mais à chaque fois, il nous dit des choses différentes sur les circonstances ! » relève Me Méry en parlant de l’ADN du compagnon trouvé sur la bouteille de white-spirit qu’il disait n’avoir jamais touchée.
A la manière d’un judoka, Me Takhedmit, tout nouvel avocat du quadragénaire qui voudrait retourner en famille aux Couronneries, reprend chaque argument pour le retourner à son avantage.
Et il s’emporte longuement sur la conduite des investigations. L’expert – et son rapport, qualifié de « brève de comptoir » – en prend pour son grade. La victime est décrite avec toutes ses fragilités pour rappeler que le suicide n’est pas une chimère. Elle l’a déjà tenté. « On a voulu à toute force bâtir une culpabilité qui ne repose sur rien », conclut l’avocat.
La chambre de l’instruction a décidé de ne pas conclure tout de suite contrairement à son habitude concernant les demandes de remise en liberté.
Le président veut disposer de la copie papier de tout le dossier pour le passer au crible et non d’une simple version numérique. La décision a été renvoyée à une semaine.
Libérez le frère, mécréants !