Leutnant
Démocratie Participative
24 décembre 2019
La Corrèze c’était il n’y a pas si longtemps Jacques Chirac.
« Il » est en pleine transition pour devenir « elle ». Emma Blondel, une Objatoise de 33 ans, s’est toujours sentie femme dans un corps d’homme. Elle raconte sa démarche pour changer de sexe. Egalement engagée pour La République en marche en Corrèze, elle se heurte à la difficulté d’être transgenre en politique.
Elle est née homme mais s’est toujours pensée femme. « Quand j’avais 13 ans, je priais pour changer de sexe même si je savais que ce n’était pas possible. » Vingt ans plus tard, Emma Blondel a choisi de bousculer les possibles. Manucure impeccable, brushing parfait, maquillage sophistiqué… Elle a abandonné Christophe pour prendre le prénom d’Emma. Et cette Objatoise, chargée de communication de La République en Marche en Corrèze, ne compte pas s’arrêter là pour vivre dans le corps qui lui correspond.
Pour devenir femme, Emma Blondel a commencé à prendre un traitement hormonal en avril dernier : des œstrogènes qu’elle prendra à vie et un autre médicament permettant de bloquer la testostérone. « Sans suivi psychiatrique, pas d’hormone. En France, lorsqu’on commence cette transition, il est obligatoire de voir un psychiatre. »
Une démarche qui doit l’emmener vers une opération qu’elle attend avec grande impatience : la vaginoplastie. Elle consiste à confectionner un vagin, un clitoris et des lèvres à partir d’un sexe d’homme.
Changer de sexe prend du temps. « Trop de temps, selon Emma Blondel. L’Organisation mondiale de la santé préconise 12 à 18 mois. En France, il faut 36 mois minimum. » Elle va aussi subir une intervention du visage en janvier. « Limer les os du front, affiner le menton… Une opération de près de quatre heures. »
Elle aurait aussi pu faire une augmentation mammaire, modifier ses cordes vocales mais elle a choisi d’en rester là. Tout cela après dix ans sans avoir mis les pieds chez un médecin. « Ce protocole est classé comme affection longue durée (ALD) par la Sécurité sociale et donc en grande partie remboursé. »
Emma Blondel a de la chance, « je n’ai jamais été insultée, je n’ai jamais été moquée ». Le regard des autres lui importe finalement assez peu même si sa famille, qui avait volontiers accepté son homosexualité, a désormais beaucoup de mal avec sa nouvelle identité.
Un de ses amis de 20 ans ne lui donne plus de nouvelles. « C’est peut-être ce qui m’a le plus déçu. On a fait les quatre cents coups ensemble… »
Pour ne pas nuire à La République en marche dont elle assure la communication en Corrèze, Emma Blondel comptait démissionner. Mais pour la référente du mouvement dans le département, Patricia Bordas, « il n’en était pas question. Si elle n’était plus en phase avec les idées portées par le mouvement j’aurais compris, mais pas pour ça. C’est un projet de vie personnel très courageux ».
En revanche, Emma Blondel s’est vue refuser une place sur la liste de Philippe Vidau, maire sortant à Objat. « Les discussions étaient plutôt positives. Tous les voyants étaient au vert. Mais fin octobre, Philippe Vidau m’a dit qu’il en avait discuté avec son équipe et que ce n’était plus possible ».
Philippe Vidau assure, quant à lui, que « comme il (NDLR : Emma Blondel) est en pleine “mutation”, ça n’a pas pu se faire. On a décidé l’un comme l’autre que ce n’était pas le moment. Mais quelqu’un viendra le suppléer, le remplacer… » Patricia Bordas ne voit pas la situation du même œil. « C’est Emma Blondel et personne d’autre ! », assure-t-elle.
Pourtant, cette femme transgenre voudrait « travailler pour Objat. Si on me propose quelque chose, je réfléchirais ». L’engagement public lui tient à cœur.
« J’aimerais faire bouger les lignes sur la transidentité, faire en sorte que le côté psychiatrisant n’existe plus. J’aimerais œuvrer pour la communauté transgenre mais pas seulement, pour ma commune, pour mon département… ».
Le progrès est aussi passé par là.